A désormais quelques jours de la reprise du championnat du Monde FIA sur la piste canadienne de Trois-Rivières et à l'issue d'une ultime répétition générale organisée lors de la dernière séance officielle de tests en Lettonie, le clan Peugeot Sport emmené par sa paire Loeb/Hansen s'apprête de nouveau à croiser le fer avec Audi Sport tandis que Volkswagen Motorsport dispose désormais d'un avantage qui s'annonce pour le moins rédhibitoire pour ses deux adversaires.
Certains lendemains peuvent se révéler plus difficiles que d'autres. Pour Peugeot, le voyage retour depuis la Scandinavie et le Varmland fut tout aussi douloureux que les affreuses migraines ressenties par les fêtards de la non moins fameuse Happy Street. Dans ses souvenirs désormais lointains, la maison bleue devait encore vaguement se remémorer cette sensation grisante expérimentée à la mi-mai lorsque Loeb triomphait enfin en Belgique après une abstinence longue de 18 mois et des neuf longueurs de retard qu'il comptait alors que Kristoffersson au général du championnat. Et si la gestation fut longue côté Peugeot, elle fut néanmoins plus que probante avec une lionne enfin en mesure de jouer les yeux dans les yeux avec des Polo qui, subitement, n'eurent plus le pouvoir d'impressionner qui que ce soit.
Pourtant, d'erreurs humaines en Norvège à une fiabilité évaporée pour la deuxième année de suite sur la piste de Barcelone, les neuf points de débours que Loeb comptait au soir de sa victoire belge auront rapidement pris des proportions inattendues. Sur les deux dernières courses, Loeb s'emploiera à signer son arrêt de mort en laissant filer pas moins de 34 unités au bénéfice exclusif d'un Johan Kristoffersson dont l'avantage est désormais porté à 48 longueurs d'avance sur le tricolore.
D'un espoir aussi réel que prometteur, l'ardoise laissée par Peugeot en Scandinavie fut aussi hasardeuse que les esprits alcoolisés titubant, sourires en coin, dans la clarté de la nuit suédoise. De la nouvelle Peugeot 208 réclamée de ses vœux par Loeb pour faire la nique à Kristoffersson, l'arrivée de l'arme construite sur mesure pour le pilote alsacien ne fut pas à la hauteur des attentes placées en elle. Où plutôt, cette dernière était bien trop "verte" pour justifier d'une entrée en compétition aussi périlleuse sur le technique et difficile circuit d'Holjes. Un choix stratégique hasardeux alors même que la lionne usitée depuis le début du championnat apparaissait comme un argument suffisant pour dire d'être largement dans le match face aux Polo.
"Ce que nous avons cherché à faire, c'est à recentrer et à abaisser les masses indiquait Bruno Famin il y a quelques semaines à l'heure de dresser la liste des nouvelles évolutions pensées en interne et qui, outre un nouveau moteur conçu "maison", devait permettre aux pilotes Peugeot de s'appuyer sur un gain d'efficacité sans équivalent.
"Quand on regarde les voitures de nos concurrents, et c'était déjà le cas pour la DS3 de Petter Solberg, on a la sensation qu'elles pivotent toutes seules sur elles-mêmes. C'est donc dans cette voie précise que nous avons cherché à travailler tout en allégeant la voiture au maximum pour ainsi recentrer au mieux les masses. Sébastien Loeb était demandeur de cette philosophie et c'est lui qui est à l'origine de ces changements. Cela allait dans le bon sens de la physique et les ingénieurs ne pouvaient être que d'accord avec sa vision des choses"
Sauf qu'aligner la voiture en compétition à un stade aussi crucial de la saison relevait d'une pure folie quand Lohéac aurait pu constituer un terrain de jeu idéal tout en permettant à Peugeot Sport de peaufiner tranquillement sa copie et ainsi se hisser en qualité de menace crédible aux yeux de Volkswagen en vue de la dernière ligne droite du championnat.
Timmy Hansen garde confiance
A Riga la semaine passée, Peugeot aura néanmoins pu réviser ses gammes avant de mettre le cap sur le Canada. A l'issue de ces tests, Timmy Hansen ne pouvait que reconnaître les difficultés éprouvées en Suède.
"Nous avons eu beaucoup à faire à Holjes et je pense même que nous avons été un peu surpris par l'ampleur de la tâche que nous devions remplir. Cependant, nous avons réussi une belle course là-bas même si nous savions d'ores et déjà qu'il nous restait quantité de choses à améliorer pour la suite. Nous avons réalisés de réels progrès durant ces tests de Riga et je suis convaincu que la voiture sera plus performante au Canada qu'elle n'a été en Suède" soulignait Hansen.
Rien de nouveau sous le soleil en somme pour une équipe Peugeot Sport désormais concentré sur le développement d'une nouvelle arme quand elle disposait pourtant de sacrés arguments avec celle usitée entre Barcelone et Hell. D'une progression linéaire, Peugeot a préféré reculer pour mieux sauter en 2019, délaissant momentanément ses objectifs de titres mondiaux.
"J'ai la sensation que nous avons désormais ce qu'il nous faut pour réellement menacer les Volkswagen. Cependant, nous devons désormais déverouiller tout le potentiel de cette nouvelle voiture et ce n'est jamais simple" poursuivait Timmy Hansen.
Si on peut s'attendre à ce que la Peugeot 208 soit logiquement en mesure d'effectuer de probants progrès d'ici Cape Town en novembre prochain et se hisser en candidate à la victoire, charge est de constater que l'histoire retiendra bien moins la stratégie initiée par Peugeot que le deuxième titre mondial consécutif désormais promis à Johan Kristoffersson.
Audi et Ekstrom se sont fait une raison ...
Plutôt que de s'en remettre à la méthode Coué, Mattias Ekstrom et Audi Sport se savent - depuis la partition jouée par Kristoffersson en Norvège en juin dernier - contraints de jouer les places d'honneurs. A Riga, Audi Sport a poursuivi son travail de sape pour améliorer la compétitivité des Audi S1. Si la firme allemande avait surpris l'an dernier en alignant au Canada de nouveaux éléments aérodynamiques directement issus du savoir-faire des bureaux d'études d'Ingolstadt pour maîtriser au mieux les spécificités d'un tracé canadien disposant de la plus longue ligne droite du championnat, cette année, la donne s'avère différente. En effet, les éléments aérodynamiques ont été figés par la réglementation en amont de cette saison 2018 et Audi ne pourra plus jouer sur les mêmes arguments. A Riga, les deux Audi S1 se sont contentées d'arborer un nouveau pare-choc avant qui devrait prendre la direction du Canada le mois prochain en même temps que Bakkerud et Ekstrom.
"Nous avons travaillé dans tous les secteurs où on le pouvait déclare Ekstrom. Nos concurrents aussi testent des choses. De notre côté, nous avons peaufiné un peu nos suspensions en plus de notre nouveau pare-choc tandis que nous avons veillé à travailler notre approche sur le plan moteur ainsi qu'au niveau de nos différentiels"
Néanmoins, les espoirs qu'avaient laissés susciter une entame de championnat où les VW Polo avaient moins été vues à leur avantage a depuis été balayé par les cinq victoires en six courses de Kristoffersson dont les deux dernières sorties avec un score maximum de 30 points se sont chargées d'annihiler les ambitions de la résistance. Autant dire qu'Ekstrom a depuis longtemps fait une croix sur le titre mondial pour se contenter d'expédier les affaires courantes en vue de la seconde partie de saison.
"Nous sommes désormais cinq à nous battre pour la deuxième place du championnat. De son côté, l'avantage dont dispose Johan est désormais trop important pour espérer pouvoir le rejoindre.Il faut être réaliste. La lutte sur cette deuxième partie de saison concerne à présent les pilotes en lice pour décrocher une place sur le podium du championnat"
A défaut d'un présent radieux, c'est sur l'avenir que semble s'être définitivement tourné le couple franco-allemand. Si Ekstrom et Audi se savent depuis longtemps comme hors du coup pour le titre mondial, Loeb et Peugeot pourront quant à eux ranger cette saison 2018 au rayon des occasions gâchées ...